Journal : le monde


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Milan a débuté sa semaine de travail sans son symbole, son « Cavaliere », tombé de son piédestal gouvernemental et démissionnaire ce week-end. À vrai dire, la capitale de Lombardie a tourné le dos à Silvio Berlusconi depuis quelque temps déjà, lassée de ses frasques et de ses belles paroles.

Le majeur en haut d'une main aux autres doigts coupés est tendu vers le ciel, juste en face de l'entrée de la Bourse de Milan, sur la petite piazza degli Affari. Les badauds s'arrêtent rigolards pour prendre en photo cette statue provocante, au milieu des hommes élégants qui sortent des banques alentour à l'heure de déjeuner. Dans la capitale financière de l'Italie, on pourrait prendre ce doigt pour un symbole.
À 75 ans, le héros Silvio vient de lâcher prise, remplacé au poste de Premier ministre par Mario Monti, le président de l'université Bocconi de Milan, la plus prestigieuse fac d'économie du pays.
Gianpiero travaille à la Monte dei Paschi di Siena, une banque clamant son existence depuis 1472. Il a 35 ans et, pour lui, « Berlusconi, c'est une autre époque ».
« Ça fait des années que l'on se demande comment l'Italie peut supporter Berlusconi comme Premier ministre. La bonne réponse, c'était qu'il plaisait aux Italiens avec sa réussite, les femmes, ses discours sur la famille, la théorie du complot, le fascisme, l'anticommunisme. Cet incroyable mélange est fini. » « Milan a ouvert la voie », déclarait dimanche le nouveau maire de gauche, Giualiano Pisapia. Lors des élections municipales en mai, la ville met fin à vingt années de pouvoir berlusconien.
« C'était sans doute le signal que quelque chose était en train de changer dans le pays. Milan a toujours été le laboratoire de l'évolution de la politique italienne », relève Pietro Ichino, sénateur démocrate de Milan. Du leader socialiste des années 1970 Bettino Craxi, au parti d'extrême droite d'Umberto Bossi la Lega Nord et Forza Italia de Silvio Berlusconi dans les années 1990, « Milan est particulièrement représentative du reste du pays et souvent en avance ».
Le fils d'employé de banque milanais, devenu première fortune d'Italie grâce à l'immobilier, puis les médias (sa holding Fininvest contrôle Mondadori, trois télés privées et une dizaine de journaux), incarne la réussite à la milanaise. Le Lombard a en général la fortune moins tapageuse. Silvio, éternellement bronzé, régulièrement lifté et repiqué d'implants capillaires, a en plus un ego surdimensionné et la langue mal pendue.

Au lendemain du tremblement de terre de L'Aquila dans les Abruzzes en avril 2009, il déclare aux sinistrés hébétés par la catastrophe qui fait 308 morts : « Il faut prendre ça comme un week-end au camping ». En pleine affaire Ruby, une prostituée mineure qu'il a d'abord tenté de faire passer pour la nièce de l'Égyptien Moubarak, il se répand d'une fierté malsaine et vulgaire, comme lors d'une soirée « bunga bunga » dans sa villa d'Arcore à 15 km au nord-est de Milan : « Il vaut mieux avoir la passion des belles femmes qu'être gay . » L'Italie s'est pourtant laissé séduire comme toutes ces belle ragazze placées en politique. « Il a légitimé les défauts des Italiens », estime Sandro Gozi, député d'Ombrie. On peut tricher avec le fisc ou réaliser des abus de biens sociaux puisque le Premier ministre s'est sorti d'histoires judiciaires du même genre (grâce à une loi sur la prescription qu'il a fait voter). Après huit ans et demi de Berlusconi lors des dix dernières années, le pays le paie rudement (1 900 milliards d'euros de dettes, 120 % du PIB).



Dans la capitale lombarde, le patron du Milan AC garde forcément des adeptes acharnés. Ici est né Forza Italia en 1994, devenu en 2007 Popollo della Liberta.
Jusqu'à la caricature
À la Taverna Morigi, rue du même nom, de joyeuses tempes grises s'interpellent autour d'un caffè ristretto, serré et parfumé.
Gianni chante avec ses mains les louanges du « patron » : « Allez trouver quelqu'un qui fera mieux que Berlusconi ! Il a servi l'Italie comme personne d'autre avant lui. On l'accuse de tout, mais la crise internationale n'est quand même pas de sa faute, si ? » « Si ! », se moquent bruyamment ses copains.
« Milan, c'est beaucoup de choses, sourit le sénateur Pietro Ichino. Il y a ceux qui l'ont soutenu, ceux qui lui sont opposés. Dans chaque camp, ils ne sont pas capables de voir leurs propres défauts. » C'est un peu la faiblesse de Silvio Berlusconi, saoulé par son pouvoir, son argent, son immunité. Devenu en fin de carrière, comme un vieil artiste (son troisième disque doit sortir), la caricature, l'ombre de lui-même. Dire qu'il ne désespère pas revenir au pouvoir...
Silvio Berlusconi Silvio Berlusconi
Né le 29/09/1936 à Milan. Deux divorces, cinq enfants.
– 1961 : après une licence en droit, se lance comme promoteur immobilier.
– 1978 : fonde la holding Fininvest, aujourd'hui présidée par sa fille Marie Elvira, qui possède trois chaînes de TV (Canale 5, Italia 1 et Retequattro), le club de foot du Milan AC, le groupe de presse et d'édition Mondadori…
– 1994 : crée Forza Italia et remporte la majorité absolue à la Chambre des députés. Premier ministre d'avril à mai (lâché par son allié de la Ligue du Nord, Umberto Bossi).
– 2001-2006 : détient le plus long mandat de Premier ministre italien.
– 2008 : après avoir renommé son parti Popollo della liberta, troisième nomination comme président du conseil.
– 13 novembre 2011 : lâché par tous devant la gravité de la situation financière, il démissionne.
– 2012 : quatre procès sont en cours pour corruption, fraude fiscale (Mediaset) et prostitution de mineure et abus de pouvoir (affaire Ruby).



Dernière édition par patchwork le Jeu 17 Nov - 1:07, édité 2 fois

Coucou,

Petit rappel : toujours donner vos sources, lorsque vous citez des articles.

:merciii: :a++:

tu as raison pardon, je complète

journal le monde

Merci beaucoup.

Tu as vu ?
L'actualité bouge encore et d'après les italiens, les changements au niveau gouvernement, ne change rien, au niveau de la gestion.
Peut-être devrait-on laisser un peu plus de temps à ce Monsieur, il a de bons bagages ?!

Et bien moi j'ai reçu d'une amie ce texte et cette vidéo magnifique...

Silvio Berlusconi renversé par Giuseppe Verdi

Le 12 mars dernier, Silvio Berlusconi a dû faire face à la réalité. L’Italie fêtait le 150ème anniversaire de sa création et à cette occasion fut donnée,à l’opéra de Rome, une représentation de l’opéra le plus symbolique de cette unification : Nabucco de Giuseppe Verdi, dirigé par Riccardo Muti.

Nabucco de Verdi est une œuvre autant musicale que politique : elle évoque l'épisode
de l'esclavage des juifs à Babylone, et le fameuxchant « Va pensiero » est
celui du Chœur des esclaves opprimés. En Italie, ce chant est le symbole dela quête de liberté du peuple, qui dans les années 1840 - époque où l'opéra fut écrit - était opprimé par l'empire des Habsbourg, et qui se battit jusqu'à la création de l’Italie

Avant la représentation, Gianni Alemanno, le maire de Rome, est monté surscène pour prononcer un discours dénonçant les coupes dans lebudget de la culture du gouvernement. Et ce, alors qu’Alemanno est un membre du parti au pouvoir et un ancien ministre de Berlusconi. Cette intervention politique, dans un moment culturel des plus symboliques pour l’Italie, allait produire
un effet inattendu,d’autant plus que Sylvio Berlusconi en personne assistait à la représentation…

Repris par le Times, Riccaro Muti, le chef d'orchestre, raconte ce qui fut une véritable soirée de révolution : « Au tout début, il y a eu unegrande ovation dans le public. Puis nous avons commencé l’opéra. Il se déroula très bien, mais lorsque nous en sommes arrivés au fameux chant Va Pensiero,
j’ai immédiatement senti que l’atmosphère devenait tendue dans le public. Il y a des choses que vous ne pouvez pas décrire, mais que vous sentez.
Auparavant, c’est le silence dupublic qui régnait. Mais au moment où lesgens ont réalisé que le Va Pensiero allait démarrer, le silence s’est rempli d’une véritable ferveur. On pouvait sentir la réaction viscérale du public à la lamentation des esclaves qui chantent : « Oh ma patrie, si belle et perdue
! ».

Alors que le Chœur arrivait à sa fin, dans le public certains s’écriaientdéjà: « Bis ! » Le public commençait à crier « Vivel’Italie ! » et « ViveVerdi ! » Des gens du poulailler (places tout en haut de l’opéra) commencèrent à jeter des papiers remplis de messages patriotiques – certains demandant « Muti, sénateur à vie ».

Bien qu’il l’eut déjà fait une seule fois à La Scala de Milan en 1986,Muti hésita à accorder le «bis » pour le Va pensiero. Pour lui, un opéra doit aller du début à la fin. « Je ne voulais pas faire simplement jouer un bis."
"Il fallait qu’il y ait une intention particulière. ", raconte-t-il. Mais le public avait déjà réveillé son sentiment patriotique. Dans un geste théâtral, le chef d’orchestre s’est alors retourné sur son podium, faisant face à la fois au public et à M. Berlusconi, et voilà ce qui s'est produit :
Après que les appels pour un "bis" du "Va Pensiero" se soient tus, on entend dans le public : "Longue vie à l'Italie !"
Le chef d'orchestre Riccardo Muti : Oui, je suis d'accord avec ça, "Longue vie à l'Italie"
mais... [applaudissements]
Muti : Je n'ai plus 30 ans et j'ai vécu ma vie,mais en tant qu'Italien qui a beaucoup parcouru le monde, j'ai honte de ce qui se passe dans mon pays. Donc j'acquiesce à votre demande de bis pour
le"Va Pensiero" à nouveau. Ce n'est pas seulement pour la joie patriotique que je ressens, mais parce que ce soir, alors que je dirigeais le Choeur quichantait "O mon pays, beau et perdu", j'ai pensé que si nous continuons ainsi, nous allons tuer la culture sur laquelle l'histoire de l'Italie est
bâtie. Auquel cas, nous, notre patrie, serait vraiment "belle et perdue".
[Applaudissements à tout rompre, y compris des artistes sur scène]
Muti : Depuis que règne par ici un "climat italien", moi, Muti, je me suis tu depuis de trop longues années. Je voudrais maintenant...nous devrions donner du sens à ce chant ; comme nous sommes dans notreMaison, le théatre de la capitale, et avec un Choeur qui a chanté magnifiquement, et
qui est accompagné magnifiquement, si vous le voulez bien, je vous propose de
vous joindre à nous pour chanter tousensemble.
C’est alors qu’il invita le public à chanter avec le Chœur desesclaves.

«J’ai vu des groupes de gens se lever. Tout l’opéra de Romes’est levé. Et le
Chœur s’est lui aussi levé. Ce fut un moment magique dans l’opéra. »
Cesoir-là fut non seulement une représentation du Nabucco, mais également une
déclaration du théâtre de la capitale à l’attention despoliticiens.

Voici une vidéo de ce moment plein d'émotion

http://www.youtube.c...bed/G_gmtO6JnRs

Oui, oui, j'ai vu et j'ai mis le lien aussi
Merci.