LE PLUS. Le permafrost, soit le nom donné aux sols gelés des régions arctiques, est parfois appelé "bombe à retardement". En dégelant, il libère de grandes quantités de carbone et de méthane. Des gaz qui auraient un effet dévastateur sur la planète, alerte Dorota Retelska, docteure en biologie.
Édité par Rozenn Le Carboulec
L’effet de serre a déjà élevé la température de la Terre de presque un degré et nous en voyons les conséquences.
Aujourd’hui, les glaces d’Arctique, du Groenland et d’Antarctique fondent vite. Le WWF rapporte que la moitié d’espèces d’animaux vertébrés a déjà disparu.
La spécialiste climat de la Banque mondiale déclarait récemment que moins d’aliments ont pu être cultivés sur la Terre en 2013, et qu’il y en aura de moins en moins ces prochaines décennies. L’eau salée s’infiltre dans les champs situés en bord de mer, les vagues de chaleur et les sécheresses tuent les cultures. L’acidification des océans empêche la croissance des huîtres, et d’autres mollusques marins. Les plages Atlantiques sont érodées, et le moustique tigre tropical a fait son apparition dans le Sud-Est de la France.
Les accords internationaux pourraient mener à une réduction d’émissions de gaz à effet de serre qui limiterait le réchauffement à deux degrés. Ce seuil a été choisi car, au-delà, le climat terrestre risque de se dérégler complètement.
Le permafrost est une bombe à retardement
Le permafrost, terres gelées du grand Nord, est parfois appelé une bombe à retardement. Il contient un énorme danger. En dégelant, il pourrait libérer une grande quantité de gaz à effet de serre qui ferait monter la température terrestre de plusieurs degrés.
Dans le permafrost sont congelés des restes de plantes et d’animaux anciens, y compris des dépouilles de mammouth. Dès que le sol dégèle, ces débris fermentent et le gaz carbonique et le méthane s’échappent dans l’atmosphère. Le méthane cause un effet de serre 23 fois plus important que le gaz carbonique (sur 100 ans).
Le permafrost va-t-il dégeler ? En Alaska, il dégèle et occasionne des glissements de terrains. La Sibérie se couvre de petits lacs de fonte de permafrost. Une partie du permafrost se trouvant sous les mers s’est dangereusement réchauffée et des bulles de méthane s’échappent du fond.
Il s'agirait d'un cataclysme planétaire
J’ai interrogé le spécialiste russe du permafrost, le professeur Sergey Zimov. Il pense que si la température terrestre augmente de 3-4 degrés, le permafrost va dégeler sur plusieurs dizaines de mètres de profondeur avant la fin du siècle.
Actuellement, il se réchauffe et fond en surface. S'il dégèle, il libérera dans l'atmosphère les gaz à effet de serre qu'il contient. La température sur Terre pourrait alors augmenter de plusieurs degrés ou dizaines de degrés supplémentaires.
Avec des vagues de chaleur insoutenables pour l’Humain ? Des tempêtes dix fois plus importantes que les cyclones d’aujourd’hui ? Quelle partie de la planète resterait alors habitable ? Ou pourrions-nous encore cultiver de la nourriture ? Il s’agirait d’un cataclysme planétaire qui bouleverserait totalement les conditions de vie sur Terre.
Si nous laissons le réchauffement augmenter, nous risquons cet avenir-là.
Arrêter le réchauffement avant le drame
Nous vivons déjà le changement climatique. Nous verrons ses conséquences au cours des prochaines décennies. Mais pouvons limiter les dégâts et laisser un monde vivable à nos enfants.
Il vaut mieux arrêter le réchauffement avant que le permafrost ne dégèle, et que les glaciers ne se détachent. Certains glaciers sont déjà fissurés au point que leur détachement de leur base est inéluctable. Tôt ou tard, ils partiront à la dérive et fonderont, élevant le niveau de la mer. Le permafrost sous-marin est proche de 0 degrés, émet des bulles de méthane et s'approche d’un point de non-retour.
Le permafrost est recouvert par une couche de terre qui dégèle en été (Flickr/U.S. Geological Survey/CC)
Les spécialistes du méthane (le groupe de scientifique d’urgence du méthane arctique) conseillent d’arrêter tout de suite les émissions de gaz carbonique et de planter énormément d’arbres pour capter le gaz carbonique de l’air. L’effet de serre diminuerait, ainsi la température terrestre reviendrait à la normale, et le permafrost resterait gelé.
On peut tous réduire notre empreinte carbone
Si nous le savons, nous pouvons tous réduire l’effet de serre.
Moi, je pédale, j’ai acheté des croquettes végétaliennes à mon chat, je recycle mes ordures. j’ai pris un appartement plus petit et mieux isolé. Je voyage moins, j’essaie de manger bio et local. Je cultive mon potager et je participe à la construction de maisons écologiques. J’achète moins d’objets, des objets écologiques, locaux, ou au vide-grenier. J’ai réduit mon empreinte carbone de trois fois environ. L’index CO2 qui apparaît sur les objets de consommation facilitera bientôt les choix.
Selon l’ONU, nous sommes face à la plus grave menace de l’histoire de l’Humanité. Il est important d’agir vite.
La conférence COP 21, qui se déroulera à Paris en décembre 2015, sera peut-être l’événement le plus important du monde, car un accord limitant fortement les émissions de gaz à effet de serre éloignerait la menace de dégel de permafrost et d’un emballement cataclysmique du climat.
Mais sera-t-il suffisant ?