Fort d’un résultat électoral sans précédent pour son parti, Matteo Renzi ne cache pas ses ambitions : donner à l’Italie un rôle de premier plan au sein de l’Union européenne, en valorisant dès juillet le semestre italien de présidence de l’UE. L’enjeu est de taille : il devra essayer d’imposer une vision plus axée sur la croissance dans les politiques économiques de l’Union tout en entamant sans tarder le processus de réformes pour moderniser le pays que les Italiens lui réclament.
"L’Italie a répondu présent, le pays est plus fort que les peurs qui le traversent et il est en mesure de peser de tout son poids en Europe." Au lendemain du scrutin européen où son parti, le PD, a remporté haut la main les élections avec 40,8% des suffrages, un résultat d’autant plus encourageant que la veille des élections son parti s’attendait plutôt à une courte victoire contre Beppe Grillo, Matteo Renzi ne cache pas sa satisfaction. Pendant la conférence de presse, il choisit néanmoins de mesurer ses propos.
Il le dit d’ailleurs, et il le répète comme un mantra : après une campagne électorale enflammée, marquée notamment par la violence verbale de Beppe Grillo, en Italie le moment est venu d’ "abbassare i toni e alzare le ambizioni", un jeu de mots pour dire qu’il est temps de modérer ses propos et de faire preuve d’ambition. L’enfant terrible, le rottamatore, est devenu aujourd’hui le garant de la stabilité aux yeux des électeurs, voilà une des lectures qui ont été données au scrutin européen : la preuve, les marchés ont immédiatement salué le verdict sorti des urnes. Quant aux ambitions, Matteo Renzi entend jouer sa partie sur l’échiquier national, bien entendu, mais également en Europe.
Le semestre italien de présidence de l’Union européenne
Matteo Renzi ne pouvait pas espérer meilleur résultat électoral pour affronter le semestre italien de présidence de l’Union qui commencera le 1er juillet prochain. Grâce au scrutin du 25 mai, le PD italien sera la première délégation nationale au sein du S&D avec 31 députés, et Matteo Renzi a l’intention de faire entendre sa voix. Il est en train de chauffer ses muscles : "nous demandons à l’Union européenne de changer son approche, non en tant que mouvement de contestation mais en tant que parti au gouvernement". Voilà la carte qu’il entend jouer pour adoucir la politique de rigueur imposée par l’Europe : "entre les populistes et les restaurateurs, il existe une troisième voie" a-t-il déclaré.
Car il ne faut pas oublier qu’en Italie aussi le sentiment anti-européen est bien présent : aux 21,1% du M5S il faut ajouter les 6,1% de la Ligue du Nord qui a retrouvé en partie son électorat après les scandales qui l’ont éclaboussée, mais encore les 3,6% des Fratelli d’Italia et les 4% de L’altra Europa con Tsipras, des formations politiques qui sont toutes très critiques envers l’euro et l’Europe.
Avant l’Europe, l’Italie
Mais l’Italie peut-elle réellement aspirer à jouer un rôle de premier plan en Europe si elle ne réalise pas toutes les réformes que l’Union lui réclame avec insistance ? Avant de préconiser un changement de perspective afin d’encourager la croissance dans les choix de politique économique de l’Union, il est indispensable d’entamer sans tarder ce processus de réformes au niveau national qui a été jusqu’à ici le cheval de bataille de la campagne de Renzi.
Le message qui arrive tout droit des urnes est clair : plus d’alibi possible, pour le jeune Premier Ministre c’est le moment où jamais de réaliser ses promesses. Loi électorale, reforme du Sénat, reforme de la justice, de l’administration publique et du travail, valorisation du patrimoine… et la liste pourrait continuer. Un homme averti en vaut deux, sembleraient suggérer les électeurs en désignant Matteo Renzi comme le grand vainqueur du scrutin tout en creusant largement l’écart avec le mouvement M5S de Beppe Grillo et avec le grand perdant de ces élections, Silvio Berlusconi (16,8%). S’il a donc réussi son baptême du feu électoral, il ne pourra pas se reposer sur les lauriers. Ses électeurs déçus pourraient lui faire payer très cher aux prochaines élections d'éventuelles promesses non tenues.
www.lepetitjournal.com