« Pas un centime ne devra entrer dans les poches de la mafia », selon la promesse solennelle du gouvernement Monti. « Le projet a deux objectifs, mettre en sécurité tous les édifices à risque d’un des plus extraordinaires patrimoines archéologiques de l’humanité et garantir que cela se fasse avec des entreprises et des travailleurs compétents et honnêtes, en tenant à l’écart la criminalité organisée. » Voilà comment le président du Conseil, Mario Monti, a présenté, il y a quelques jours, le « Grand projet pour Pompéi », à la préfecture de Naples.
Quatre autres ministres du gouvernement se sont aussi déplacés pour se porter garants de la transparence des opérations de sauvetage de ce site de 66 hectares qui accueille 6 000 touristes par jour, avec des pics à 20 000, en été. Parmi eux, la ministre de l’intérieur Anna-Maria Cancellieri, Lorenzo Ornaghi, ministre de la culture, et Fabrizio Barca, un profond connaisseur du Mezzogiorno, à la tête du ministère de la cohésion sociale.
Un tel déploiement ministériel pour ce projet s’explique par le tournant que veut imposer l’exécutif dans la lutte contre les infiltrations de la Camorra, la mafia napolitaine, dans les travaux publics. Il s’agit de prouver aux Italiens et à l’Europe, qui finance ce projet de 105 millions d’euros à hauteur de 40 %, que l’Italie redevient effectivement un pays digne de confiance.
LUTTE CONTRE LA MAFIA NAPOLITAINE
« Pas un centime d’euro ne doit entrer dans les poches de la mafia » , a martelé la ministre de l’intérieur, faisant de cette affirmation un slogan de la lutte contre la mafia napolitaine et ses cols blancs. La vraie nouveauté, c’est la constitution immédiate d’un groupe d’experts qui, au nom de l’État, sera chargé du contrôle des chantiers et de toute utilisation des fonds.
Il devra vérifier scrupuleusement la régularité des appels d’offres européens, la possession du certificat anti-mafia pour les entreprises qui travailleront, ou encore la traçabilité de tout paiement. « Les contrôles des chantiers se feront minute par minute » , a lancé Anna-Maria Cancellieri, ajoutant, « nous ne voulons plus voir un seul ouvrier sans permis d’accès au site ». Autrement dit, plus question d’embaucher sans contrat en règle.
RELANCE ÉCONOMIQUE DU PAYS
À travers la relance de Pompéi, il s’agit également pour le gouvernement de démontrer qu’en soignant le plus grand malade culturel du pays, on met aussi en place une thérapie de fond pour guérir de ses maux le système italien, et faire de la remise en état des richesses culturelles de l’Italie, si négligées par le passé, un des moteurs de la relance économique du pays. Or, la première condition, est bien la transparence totale dans la passation des marchés.
À l’occasion de la présentation du « Grand projet pour Pompéi », Mario Monti a ainsi annoncé que cinq appels d’offres seront adjugés avant le 31 décembre, pour une valeur de 6 millions d’euros. La première tranche de travaux de restauration concernera quatre Domus, dont la villa de Sirico et le cryptoportique.
Les spécialistes de Pompéi se réjouissent, quant à eux, de l’embauche, sur concours, de treize nouveaux archéologues (il n’y en avait que neuf avant) et de huit architectes. Pour eux, les urgences à traiter sont également dans les travaux d’entretien régulier du site et dans la création d’un véritable plan de prévention, afin que Pompéi ne fasse plus la une des médias internationaux pour l’écroulement de ses murs, mais pour la renaissance de sa splendeur.
ANNE LE NIR, à ROME