Gianlugi Nuzzi est l’un journaliste des plus connus en Italie. Après avoir travaillé comme envoyé spécial pour les plus grands quotidiens nationaux, il a connu un énorme succès avec son livre enquête Vaticano Spa (en français Vatican SA), un bestseller traduit en 14 langues. Personnage savant et de charme, il s’est ouvert à votre rédaction pour une brève interview. L’occasion de parler de son succès, de son livre et de son rapport avec Milan et la France.
Gianluigi Nuzzi est un personnage intriguant dans le monde de l’information italienne et internationale. Journaliste d’enquête, il a travaillé pour le Corriere della Sera, le principal quotidien national. Il a collaboré comme envoyé spécial pour le magazine Panorama et pour le quotidien Libero.
Actif également dans le monde de la télévision, il figure parmi les auteurs du programme de large succès L’Infedele, sur la chaine LA7. Depuis l’année dernière, il conduit l’émission Quarto Grado, transmise par la chaine Rete 4, qui fait partie du groupe Mediaset.
Mais le vrai succès arrive pour Nuzzi en 2009, quand il consacre ses attentions à l’univers du Vatican, avec son bestseller, Vaticano Spa (paru chez Chiarelettere et traduit en 14 langues). Un livre-enquête passionnant et révélateur, qui dévoile les secrets et les scandales financiers qui ont affecté le Vatican et son institut de crédit, le IOR.
Les leaks contenus dans le livre de Nuzzi (appelés ensuite Vatileaks, en écho au célèbre site internet wikileaks) ont fait le tour du monde et ont contribué à mieux comprendre une période obscure et mystérieuse de l’histoire italienne et européenne.
Nuzzi a consacré ses attentions au Vatican et à ses secrets dans un autre livre-enquête, Sua Santità. Le carte segrete di Benedetto XVI. Un livre construit sur une vaste documentation que Nuzzi a su repérer grâce à un informateur anonyme au sein du Saint-Siège.
Lepetitjournal.com de Milan : Vous jouissez d’un succès important et mérité, qui se fonde sur un travail constant depuisplusieurs années. Comment arrivez-vous à le gérer, entre votre vie privée et votre personnage public ?
Gianliugi Nuzzi : Le succès ne dure qu’un instant. Au contraire, le métier de journaliste, c’est quelque chose que l’on construit et enrichit tous les jours. Si j’étais dans la condition de “gérer mon succès”, je serais irrémédiablement vieux : quelqu’un qui ne parle que de ses souvenirs.
Votre livre, “Vatican S.A. – Les archives secrètes du Vatican” (Éditions Hugo & C) a été publié et vendu en France avec de bons résultats. Et pourtant la France n’a pas le même rapport avec le Pape et le Vatican que l’Italie. En France, on n’a connu de la présence du Vatican dans les frontières nationales qu’au XIVe siècle, à Avignon. Peut-on encore dire que l’histoire est magistra vitae (maîtresse de vie) ou les différences entre notre période et la papauté d’Avignon sont trop profondes pour être comparables ?
La communauté catholique française a été bien attentive dans la gestion de la crise de la curie pendant la papauté de Ratzinger et elle a bien su identifier les responsabilités et les rôles des cardinaux italiens.
L’Italie et la France sont deux pays réunis par les traditions vigoureuses de notre “vielle Europe”. Aujourd’hui, on a plusieurs intérêts et similitudes en commun, mais aussi de nombreuses nuances qui nous séparent. Qu’en pensez-vous ?
L’Italie et la France sont deux pays aux racines entrelacées et dont le destin et commun. On dirait presque inévitablement.
Milan, votre ville est la plus française des villes italiennes, la plus ouverte à l’Europe. Qu’en pensez-vous? A-t-elle encore aujourd’hui, à un an d’Expo 2015, cette force innovante qui l’a toujours caractérisée ?
Milan me semble aujourd’hui une ville immobile, en retard par rapport à l’agenda et aux engagements internationaux. Le chef-lieu lombard aujourd’hui n’est pas assez généreux dans l’investissement de ses propres ressources et trop timide dans l’acceptation des changements que le monde entier lui demande. Le problème majeur est représenté par une politique encore trop ancrée à la bureaucratie. Et ça, c’est inadmissible aujourd’hui, dans l’Europe du web.
Quel est votre souvenir, votre expérience la plus forte liée à la France ? Un goût, un parfum, une gourmandise ?
Je n’ai pas de doutes : les vins du producteur bordelais Château Margaux, qui figurent pour moi parmi les vins les plus intrigants du monde. En général, j’ai quand même plusieurs souvenirs qui sont liés à la France, en particulier dans mon enfance. Quand j’étais gamin j’avais l’habitude de passer mes vacances à Gap. Ensuite, à Monaco, j’ai eu l’occasion d’assister à des compétitions d’Offshore (des compétitions de gros bateaux à moteur, ndr) depuis un hélicoptère. À Paris, j’ai connu la ville souterraine des archives secrets et des grands palais !
Tommaso Venturini et M.T (Lepetitjournal.com de Milan) – jeudi 27 mars 2014