Le 2 Juin est un jour important pour les Italiens. Jour de la fête de la République, à l’image du 14 juillet en France, c’est l’occasion à Rome d’un grand défilé en présence des représentants de l’Etat.
Mais cette année, à cause des séismes qui ont ravagé l’Emilie-Romagne, ce défilé revêt une autre signification
Le 2 Juin, l’Italie célèbre la proclamation de sa République choisie par référendum en 1946. Chaque année, les forces représentantes de la nation défilent sur la Via dei Fori Imperiali à Rome pour célébrer ce jour symbolique. Cependant cette année, tout le monde n’est pas heureux que cette célébration ait lieu.
Depuis une semaine les revendications pour l’annulation du défilé militaire du 2 Juin se multiplient sur les réseaux sociaux Twitter et Facebook. L’argument avancé : la mobilisation des forces armées et le budget engagé devraient être déplacés sur la région sinistrée par les séismes de ces derniers jours.
Le président de la République s’est empressé de répondre. Une réponse qui ne satisfait pas l’opinion publique. "Nous célèbrerons sobrement le 2 Juin en mémoire des victimes. Nous ne pouvons pas seulement nous lamenter. Nous avons le devoir de faire passer un message de confiance. Je pense que la République ne peut pas renoncer à célébrer sa naissance et que le pays doit donner, dans un moment douloureux, un exemple de fermeté et de sérénité", a déclaré Giorgio Napolitano.
De nombreux politiciens, comme Antonio Di Pietro, Nichi Vendola, ou encore Gianni Alemanno, ne soutiennent pas cette décision du Quirinal. Le Maire de Rome a même déposé sur Twitter un "appel respectueux" pour que le défilé du 2 Juin "soit remplacé par un hommage à l’Altare della Patria" où repose le Soldat Inconnu.
Mais la parade militaire du 2 Juin aura bien lieu. Quelques 3.200 militaires et civils défileront pour cette journée dont le budget annoncé par le ministère de la Défense avoisine les 2.900.000 euros. La manifestation sera plus "sobre" que celle des années précédentes avec une économie de presque deux millions par rapport à 2011 et un effectif militaire réduit de moitié. Pour ce qui est du coût des infrastructures (gradins et installations particulières), là aussi le budget a été revu à la baisse, passant de 877.000 euros en 2011 à 594.000 euros cette année.
Certes, le budget et les effectifs seront réduits mais aux yeux de l’opinion publique cela ne suffit pas. "On ne veut pas qu’elle soit sobre ! On n’en veut pas du tout !" pouvait-t-on lire sur Twitter jeudi matin. Le rendez-vous a d’ailleurs été donné à midi ce même jour, devant le Quirinal, pour déposer une pétition ayant rassemblé plus de 100.000 signatures, contre la parade du 2 juin.
Sur les réseaux sociaux la mobilisation continue et les appels au boycott de la manifestation se multiplient comme le démontre ce message, adressé aux forces armées sur Twitter : "Demandez à être muté en Emilie-Romagne. C’est là que vous êtes utiles".
De nombreuses villes ont par ailleurs choisi de renoncer aux évènements organisés cette semaine. Ainsi, à Venise, la manifestation des syndicats qui était prévue jeudi n’a pas eu lieu. Ces derniers se déclarent "solidaires aux populations, aux familles des victimes et aux administrations locales des villes touchées par les séismes".
Ce n’est pas la première fois que l’Italie est dans cette situation. En 1976, suite au tremblement de terre du Frioul, le ministre de la Défense de l’époque, Arnaldo Forlani, avait suspendu la parade nationale pour choisir de déposer une couronne de fleur sur la tombe du Soldat inconnu. Encore aujourd’hui, ce dernier aurait agi de la même façon : "Il serait approprié de mobiliser toutes les énergies nécessaires dans les zones touchées par le séisme. La fête de la République doit être célébrée. Mais dans une situation aussi difficile pour le pays, je me limiterais à une manifestation symbolique, comme un hommage à l’Altare della Patria, en supprimant tout ce qui peut avoir un coût excessif".
Ce 2 Juin sera donc entaché par les protestations. Mais c’est surtout l’incompréhension de la part d’une bonne partie de l’opinion publique, face à la surdité du Quirinal, qui creuse, un peu plus, le fossé entre le pouvoir et la population.
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